Out El Kouloub, une écrivaine égyptienne d’expression française qu’on se doit de sauver de l’oubli!
Out El Kouloub est une romancière égyptienne d'expression française et ma toute dernière obsession que je tiens absolument à vous faire découvrir. Cela me permet d'évoquer plusieurs de mes centres d'intérêt à la fois, le féminisme et son histoire dans le Moyen-Orient, la francophonie et les auteurs étrangers d'expression française ainsi que l'histoire de l'Égypte contemporaine.
Née en Egypte en 1899 elle est issue d'une famille aisée et reçoit une excellente éducation. Ses œuvres nous plongent dans l’univers des femmes égyptiennes à partir de la fin du XIXème jusqu’au début du XXème siècle. Par le biais de romans solidement construits avec des histoires passionnantes on découvre la condition féminine égyptienne dans toute sa complexité. Elle nous montre des femmes de tous les milieux sociaux et explore le vécu de chacune d'entre elles et leur façon de percevoir leur propre condition sans exotisme, sans orientalisme, sans paternalisme aucun ce qui me ravit.
Elle parle également du système judiciaire Égyptien ce que je trouve fascinant et décrit une Égypte beaucoup plus superstitieuse et dominée par la magie que celle d'aujourd'hui. Je vais parler de son roman intitulé Ramza qui a été son plus grand succès et notamment celui où son féminisme est le plus clairement exprimé.
RAMZA:
Ce roman raconte l'histoire de Ramza, une fille née dans un harem dans une bonne famille au Caire et qui reçoit une excellente éducation et apprend le français grâce à sa gouvernante, Mademoiselle Hortense, une préceptrice originaire du limousin qui subit avec bienveillance l’esprit rebelle de Ramza. La mère de Ramza était esclave et ne s’est jamais plainte de sa condition ce que Ramza trouve incompréhensible. Elle refuse d'être mariée de force et décide de s'enfuir pour épouser une espèce de potiche mollasson (c'est l'impression que l'auteur donne du monsieur en question) contre le gré de son père et de la société toute entière. Son père tente d'annuler le mariage et réussit et on lit donc également les détails fascinants du procès dans un système judiciaire Égyptien indépendant et ce malgré la politisation du procès. Le potiche mollasson évidement se lasse d'elle et elle se rend compte qu'elle préfère de loin se battre pour sa liberté par le biais de son procès que de vivre avec un monsieur qui a moins de courage qu’elle. Elle dit notamment à son mari timoré «on fait campagne en ce moment, pour l’émancipation des femmes, faudrait-il que ce soient elles qui luttent aussi pour l’émancipation des hommes ? »
Ramza est également une grande critique du voile, qu’elle trouve aliénant et insupportable. Le roman se termine sur cette phrase : «Un chiffon noir traînait sur la couchette: mon voile que j'avais retiré la veille. Je le froissai avec haine. Le temps n'était pas encore venu cependant de m'en libérer. Je le remis comme le train approchait du Caire. Mais je me jurai de ne m'accorder aucun répit jusqu'à ce qu'ait disparu du visage des femmes d’Orient, mes sœurs, cette marque du despotisme jaloux de leurs maris ou de leurs pères ».
Donc voilà je tenais à en parler à ce que cela intéresse, par ce que je vois quelques posts circuler au sujet de cette grande dame sur facebook mais ils restent tous assez superficiels. Ces livres ne sont plus imprimés et il est très difficile de les trouver en français mais la traduction anglaise de certains de ses romans est disponible. Un seul de ses romans, Hefnaoui le Magnifique est disponible en format Epub et sur kindle en français. J’ai écrit aux éditions Gallimard qui l’éditaient auparavant et ils m’ont affirmé n’avoir aucun projet de rééditer cet auteur. C’est bien dommage.